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Le Bâti Médiéval > Le Bâti Rural

Le bâti rural du Moyen Age : le Manoir

Le présent article se focalise sur le manoir médiéval. Ceci vous éclairera sur les différentes structures existantes sous le même dénominatif "manoir" :
- le manoir à proprement parler,
- et la maison-forte.

Par ailleurs, de même que l'article précédent, nous ne présentons le manoir médiéval que sous ses aspects architecturaux. Nous n'aborderons nullement les aspects sociaux ou juridiques qui y sont rattachés.
Si cela vous intéresse, nous vous invitons à vous munir du livre d'Emmanuel Litoux et de Gaël Carré "Manoirs Médiévaux" aux éditions "Patrimoine Vivant" disponible sur le site Internet de l'Association Rempart, livre dont est tiré le présent article.


A un échelon inférieur aux châteaux, le seigneur châtelain ayant, lui, le droit de ban (le pouvoir judiciaire, économique et militaire) sur son territoire, le manoir est souvent la propriété de la petite noblesse et s'apparente à une seigneurie foncière. Il s'agit le plus souvent de terres agricoles cultivées en direct par le propriétaire ou "données" en tenure contre redevance (location).

Les différents types de Manoirs


Au même titre que les résidences châtelaines les plus prestigieuses, le manoir, dans sa configuration spatiale, s'organise autour de la séparation des lieux d'apparats (la salle) des lieux privés (la chambre).
  1. Le logis barlong


    • Les salles de plain-pied montant sous charpente

      La séparation du privé et du public est ici très marquée puisque la salle de plain-pied, dont la toiture fait office de plafond, est seule dans un bâtiment.
      Les logements privés sont indépendants à la salle et peuvent occuper soit un autre bâtiment annexe, soit être dans le prolongement de la salle ou accolés en appentis et au premier étage, le rez-de-chaussée étant occupé par la cuisine ou le cellier.

      D'autres logis montrent des agencements plus élaborés avec la juxtaposition de plusieurs volumes barlongs disposés en L ou en T.

      D'une manière générale, dès le XIVème siècle, la formule du bloc résidentiel détaché disparaît au profit de plan barlong intégrant fonctions privées et d'apparat au sein d'un même espace.
      De la même façon, la salle basse avec annexe en appentis est progressivement délaissée en raison des contraintes d'éclairage, le bâtiment en appentis nécessitant de mettre des fenêtres très haut placées sur le mur pignon de la salle, au-dessus des toitures accolées.

      Les logis tendent donc à s'allonger tandis que la structuration interne se densifie avec la multiplication des cloisonnements et des murs de refend. Certaines salles sont ainsi flanquées des 2 côtés par des chambres surmontant en rez-de-chaussée des espaces de stockages ou une cuisine.

    • Les logis à salle haute

      Dès l'époque carolingienne, le fait de disposer la salle à l'étage introduit visuellement une hiérarchisation des fonctions, le commun au rez-de-chaussée (cellier, cuisine, etc...) et l'élite à l'étage.
      Ces manoirs peuvent se ranger en deux grandes catégories d'édifices.
      le manoir simple


      1. Les salles hautes simples
        Ce logis se réduit à sa plus simple expression puisqu'il occupe un volume monobloc présentant une pièce inférieure à usage de cellier ou de service surmontée d'une unique pièce multifonctionnelle (salle, chambre), ou éventuellement de 2 étages, le premier pour la salle et le second, sous comble, pour la chambre.



        A la fin du Moyen Âge, le "minimum seigneurial" dans les manoirs les plus modestes se compose bien souvent d'une salle basse du commun, faisant à la fois office de cuisine et de pièce de réception, coiffée d'une pièce haute privative à usage de chambre. Ces bâtiments présentent un plan assez peu allongé voire même carré, conférant à l'édifice une silhouette turriforme. Des moyens financiers légèrement supérieurs permettent parfois de rejeter en appentis la cuisine, libérant la salle des contingences alimentaires.

      2. Les logis avec salle haute et refend
        Majoritairement le choix d'une salle haute impose la présence d'un bloc privé jointif dans l'alignement de la salle. Ce bloc privé jointif peut parfois être désaxé ou en angle.
        Les formes d'habitat les plus courantes possèdent un plan rectangulaire divisé par un mur de refend unique, disposé approximativement au tiers de la longueur du bâtiment, créant deux pièces par niveau.
        D'autres logis ont été construits dans une logique d'empilement des niveaux qui accentue la verticalité de l'édifice. Chaque niveau comporte alors une salle accompagnée d'une ou plusieurs pièces adjacentes.

        La multiplication des refends et des ailes en retour caractérisent des programmes résidentiels plus complexes, aux distributions plus élaborées entrainant souvent la construction de plusieurs escaliers.
        le manoir

    • Le logis-porte, une variante du logis à salle haute
      manoir porche


      Ces édifices se caractérisent par l'intégration du porche dans le corps de logis. Celui-ci conserve alors une silhouette assez homogène et peu élancée, contrairement aux tours-portes.
      Parfois doublée d'une porte piétonne, l'ouverture, qui débouche souvent sur une cour fermée, se développe sur toute la hauteur du premier étage, voire éventuellement jusqu'au second niveau de la bâtisse.
      Comme pour les autres logis barlongs, le rez-de-chaussée est dévolu à un usage utilitaire, les pièces nobles occupant prioritairement l'étage.


  2. La Tour


    Il convient tout d'abord de bien faire la distinction entre la tour seigneuriale du manoir et la tour-maîtresse des forteresses édifiées par la haute aristocratie.
    Nous parlons de tour lorsque la hauteur du bâtiment est supérieure à sa longueur. Néanmoins, il existe des cas litigieux où le bâtiment est aussi long que haut. Dans ce cas, l'absence de construction accolée étagée et, plus encore, le choix d'un couronnement avec crénelages ou échauguettes (même factices) conduit à privilégier le concept de tour au détriment de celui du logis barlong.

    • Les tours-logis
      manoir tour





      Il renferme systématiquement une ou plusieurs pièces consacrées aux fonctions ostentatoires (apparat) ou privatives.
      Le caractère résidentiel se manifeste parfois au détriment des contraintes défensives avec l'ouverture de larges baies, le déploiement d'éléments décoratifs et de confort.
      L'organisation interne propose le plus souvent un rez-de-chaussée aux fonctions utilitaires, un étage d'apparat et le dernier pour la chambre.
      Une multitude d'édifices s'agrémente d'une ou plusieurs tourelles, le plus souvent sur les angles, qui peuvent accueillir un escalier en vis.






    • Les tours avec ailes accolées

      Ces bâtiments proposent une tour, avec ou sans dispositifs de défenses, abritant des fonctions exclusivement privatives, et une aile barlong pour l'apparat et la réception.
      La multiplication des ailes a donné naissance à des plans en L, en U ou en carré autour d'une cour.

    • Les tours-portes

      Cet emplacement stratégique confère au logis une fonction défensive et de surveillance. Il suppose un dispositif de clôture systématique à l'aide d'une enceinte, éventuellement complétée d'un fossé.
      La tour-porte pouvait aussi remplir une fonction de porterie, sorte de logement secondaire indépendant du corps d'habitation principal. Il était alors confié à un tiers ou à des gens d'armes.


Les différents types de fortifications


Le seigneur, tirant revenus de sa seigneurie foncière, doit donc nécessairement se protéger et apporter des éléments de défenses à ses bâtiments. Ces fortifications, de différents types, dépendent de la raison d'être du bâtiment, des moyens financiers du maître d'oeuvre et de son droit ou non de fortifier.

  1. La Maison-Manoriale : un complexe résidentiel ouvert et faiblement fortifié.

    manoir

    Le manoir est un lieu de production agricole. Il est organisé en plusieurs bâtiments spécifiques (logis, grange, écuries, etc...) rassemblés autour d'une cour.
    Il n'a pas à proprement parlé d'éléments de fortifications, bien que la notion de protection ne soit pas totalement absente.
    Parfois un mur, une palissade, ou des haies d'épineux entouraient la cour rendue accessible par une porte. Le dispositif pouvait aussi présenter un fossé, sec ou en eau, et accompagné éventuellement d'une levée de terre.


  2. La Maison-Forte : une fortification intermédiaire entre Maison-Manoriale et Château.


    la maison forte
    La maison-forte est aussi un lieu de production agricole mais la notion même de maison-forte rend compte d'une réalité défensive perceptible à travers le déploiement d'éléments de fortification, qu'il s'agisse d'ouvrages terrassés ou maçonnés.
    Ces attributs défensifs n'ont d'autre but que de protéger les biens personnels de la seigneurie foncière d'une menace diffuse et désorganisée tel le maraudage.
    Aussi, dans un souci d'économie, les constructeurs choisissent bien souvent d'aligner les bâtiments domestiques et agricoles le long des fossés, délimitant ainsi l'enclos seigneurial. Des portions de murs, aveuglent ou parcimonieusement munis de fentes de tir, viennent clôturer le dispositif en reliant les constructions non mitoyennes.
    Pour autant, certaines maisons-fortes peuvent avoir l'air de véritables petites forteresses et, en plus des fossés, se dardent d'un pont-levis, de tours flanquantes ou non, voire même, pour les structures les plus prestigieuses, d'un châtelet d'entrée. De même, le mur d'enceinte se distingue clairement d'un quelconque mur gouttereau d'un bâtiment agricole par son épaisseur et l'ampleur de son élévation, et peut éventuellement posséder un chemin de ronde crénelé.

  3. Les moulins : une fortification à vocation économique.


    Au Moyen-Âge, certains équipements coûteux et inhérents à un droit seigneurial tel le moulin à eau, pouvant générer d'importants revenus, ont parfois été intégrés dans des constructions fortifiées abritant des espaces résidentiels. La protection des bâtiments est assurée par des ouvertures de tir systématiques, des échauguettes et des bretèches disposées au-dessus des entrées.
    moulin